dimanche 16 septembre 2007

La guerre des sexes

Récit totalement FICTIF écrit dans le cadre du cours Rédaction, style et clarté (session A06) . J'avais envie de vous en faire part.

Dans une relation, tout revient toujours au sexe. La nôtre n’a pas fait exception à la règle.

Début juin : ma dernière année de cégep venait de prendre fin. Libérée de cet enfer! Libérée des cours ennuyants et inutiles! LI-BÉ-RÉE! Je me prévoyais un été complet à rôtir sous les chauds rayons du soleil afin de décompresser et de prendre des forces pour débuter en beauté une nouvelle étape : l’université!

Ne rêve pas en couleur la grande! Ton été est planifié depuis avril.

En effet, cette année-là, j’avais décidé de travailler à la Kruger : pas question pour moi de me la couler douce. D’après Papa, un emploi estival (trop) bien rémunéré pour quatorze étudiants chanceux, enfants d’employés de la compagnie.

Dès la première journée de travail, j’ai su que cet été serait le plus mémorable (et le plus chargé!) depuis aussi loin que je me souvienne. Je connaissais déjà bon nombre d’étudiants du groupe puisque nous avions été au primaire ensemble. D’un coup, l’appréhension qui me rongeait s’est dissipée. Les nouveaux, dont je faisais partie, représentaient la moitié du groupe et les anciens semblaient sympathiques. Notre tâche consistait à nettoyer les bassins de traitement des eaux usées, aussi appelés réacteurs biologiques séquentiels (RBS) qui, remplis et fonctionnels, contiennent 6 400 m3 d’eau.

Visualisez la hauteur et la largeur de ces immenses réservoirs une fois vides… Impressionnant, non?

Je me sentais minuscule, mais j’étais armée d’un courage et d’une volonté qui prouveraient à tous que je suis autre chose qu’une « fi-fille-à-papa-qui-ne-veut-pas-se-salir-et-qui-n’est-pas-capable-d’accomplir-des-tâches-physiques ». Dans le bassin, nous nous en donnions à cœur joie. Plus j’observais mes collègues et plus une certitude s’imposait : patauger tous ensemble dans la boue organique renforcerait certainement nos liens.

Mon regard s’est enfin posé sur un garçon, grand et châtain qui portait de petites lunettes. En un mot : adorable. Intriguant, mystérieux et surtout mignon, il ne parlait presque pas. Je lui lance : « Heille! Gars aux lunettes, tu t’appelles comment? » Il relève la tête, l’air surpris par la tournure de la question. « Thomas. »

Thomas, joli prénom pour un joli garçon. Thomas…

Une aussi brève présentation attire toujours son lot de questions, surtout venant de ma part. Je suis la reine des interrogatoires alors :

– T’as quel âge, Thomas?
– 22.
– D’accord. T’as des frères, des sœurs, des chiens, des chats?
– Non, oui, non, non.
Les monosyllabes me tuent.
– Tu fais quoi dans la vie?
– J’vais à l’école et je travaille ici.
– T’étudies en quoi? Où? Pourquoi?
– En électronique industrielle au cégep de Rivière-du-Loup. Ça suffit là! T’es vraiment fatigante avec tes questions!
– Je tente d’en apprendre plus sur toi. Et, comme on entend les mouches voler, j’ai pris mon courage à deux mains, tu sauras, pour briser ce silence digne d’un monastère!

J’éclate de rire, bientôt suivie par Martine, Émilie, Vanessa, Martin et Jérôme, les cinq autres témoins de notre première discussion. Il me regarde, pousse un énorme soupir et dit : « Je sens qu’on ne va pas s’ennuyer avec toi dans les parages cet été… »

Ô non mon grand! Ô non!

L’été filait. Nous avions déjà fini de nettoyer la moitié des bassins. Plus le temps avançait, et plus les liens de notre groupe étaient forts. Thomas et moi entretenions un rapport spécial. Nos nombreuses conversations mettaient en lumière nos intérêts communs et représentaient beaucoup à mes yeux.

À vrai dire, je voulais plus… Sa simple présence dans un lieu me donnait le goût de me coller à lui et de ne plus le laisser partir. Ce sentiment amplifiait sans cesse et je n’arrêtais de me demander s’il était partagé.

La réponse m’a été en partie donnée, à la fin juillet, alors que nous nous trouvions à Québec pour nous reposer après dix longues journées de dur labeur. Lors du souper, nous discutions des relations de couples. Thomas ne voulait pas avoir de copine : « J’ai pas le temps pour une blonde. Pis j’veux pas rien devoir à personne. Une relation, ça m’étouffe. »

Cette affirmation, comparable à un coup de poing au visage, m’a déstabilisée. Je ne comprenais pas comment il pouvait clamer, avec autant de force, une chose pareille. Notre formidable complicité et la compatibilité certaine de nos caractères ne changeaient donc rien dans sa vision du couple?

Parfait… Je ne dois plus me faire d’idées. Ne plus attendre un geste de sa part. Tant pis! Au suivant!

Pas plus tard que le lendemain, il me serrait contre lui et ne cessait de me lancer des regards chargés de sous-entendus. C’était à n’y rien comprendre.

Les filles, plus compliquées que les garçons? Mon œil!

Ces incompréhensibles agissements se reproduirent souvent. Il s’éloignait et m’ignorait pour mieux « me » revenir. Tactique masculine ou indécision? La fin de l’été approchait et je me lassais peu à peu de ce jeu; je désirais mettre les choses au clair avant qu’il parte pour Rivière-du-Loup. À ma grande satisfaction, l’occasion s’était enfin présentée lors d’une soirée chez Martin. Je lui suggérai de descendre à la cave pour discuter :

– Thomas, j’pense qu’on doit clarifier certaines choses.
N’essaie pas de me faire gober que tu ignores ce dont je parle. Tes yeux te trahissent.
– J’vois pas ce que tu veux dire.
Je le savais, tu es si prévisible!
– Qu’est-ce que tu attends de moi au juste?
– Ariane, j’veux pas de copine et tu le sais. On peut être des… amis modernes si tu le souhaites…

Des amis modernes! Quel beau terme pour éviter la façon crue de dire : « Toi et moi, ça ne peut être que sexuel. » Je la voyais venir celle-là! C’est quoi cette histoire de fous? Pourquoi ce genre de truc n’arrive qu’à moi? Je veux un bon gars, c’est si compliqué?

Thomas sentait ma faiblesse et mon impuissance devant la situation. Pour une fois, je ne trouvais rien à répondre : j’étais démunie devant autant de franchise. La tempête faisait rage. Les phrases se bousculaient dans ma tête, mais pas le moindre petit commentaire ne voulait se risquer à franchir mes lèvres.

Coucher avec toi? Pour l’amour de Dieu! Tu sais l’effet que tu me fais! Tu souhaites ma mort? Souffrance, 1. Ariane, 0.

Déçue, je rejoignis les autres.

Les dernières semaines au RBS n’ont pas été faciles, ni pour lui ni pour moi. Je tentais d’éviter son regard, de me soustraire à toute discussion compromettante. Les mots « amis modernes » me revenaient toujours en tête. La colère diminuait peu à peu pour faire place à une incompréhension partielle.

Incompréhension partielle? Non, totale! Pas de temps à consacrer à une fille? Que du sexe, rien d’autre? L’amour qu’est ce que tu en fait? Ridicule!

Septembre : l’université commence, une nouvelle routine s’installe. Les copains de la Kruger et moi communiquons par Internet : « Je m’ennuie de vous! », écrit la majorité. Parfait! Éclatons-nous donc une (première) dernière fois tous ensemble :

À : Kruger
De : a-ri-a-n-eee@hotmail.com

Conclusion de l’été. Rendez-vous chez Martin.
6 septembre 2006, 20 h.
Soyez-y!
Ari xoxox

Je reverrai donc Thomas bientôt. La préparation mentale s’amorçait. Les jours passaient beaucoup trop vite et, avant que je n’aie eu le temps de crier « anticonstitutionnellement », le 6 septembre cognait à ma porte.

La soirée se déroulait sans anicroche. Thomas ne me quittait pas d’une semelle. L’alcool l’aidait à mettre de côté sa pseudo indépendance? Une, deux, cinq, sept bières plus tard, j’oubliais aussi ma belle résolution. Dans une relation, tout revient toujours au sexe…

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